La fast fashion à la française présente les mêmes défauts que la version internationale : production massive, marges optimisées aux dépens des acteurs locaux, et impact environnemental largement sous-estimé.

Décryptons les stratégies appliquées par certaines marques proposant des vêtements “made in France” à des prix défiant toute concurrence.

La qualité “made in France” estampillée n’est pas forcément avérée

Un paradoxe dans l’industrie textile

La fast fashion est souvent associée à des géants industriels produisant massivement. Cependant, un nouveau phénomène émerge en France : certaines marques se présentent comme éthiques et locales alors qu’elles appliquent les principes de cette surconsommation textile.

Ces enseignes, qui revendiquent la fabrication régionale, proposent ainsi des pièces à prix réduits et produites en grandes séries. Oui, vous avez bien lu. Antinomique, non ?

Quid de leur impact réel sur les conditions de travail et l’environnement… Pensez-vous réellement que produire en masse, et si peu cher, respecte la planète et les Hommes ?

Un modèle français : éthique ou archétype ?

Les consommateurs sont de plus en plus sensibles aux questions écologiques et sociales. Ils cherchent alors des alternatives et sont attirés par des marques qui mettent en avant la production responsable et les matières durables. Les grandes marques saisissent donc l’opportunité : vive les parts de marché !

Ces mêmes marques françaises produisent à grande échelle, à bas prix et renouvellent rapidement leurs collections. Cette position soulève donc des interrogations, notamment sur la sincérité de l’engagement écologique et social

Vêtements made in France éthiques : quand “chic” rime avec “hic”

Des conditions de production préoccupantes

Produire en France est plus coûteux en raison des charges sociales et des salaires plus élevés que dans certains pays. Certes, on ne peut concurrencer la main-d’œuvre asiatique bon marché, mais on peut refuser d’y contribuer.

Ainsi, lorsqu’une marque propose un prix bas pour des vêtements made in France, il devient légitime de se demander à quel prix réel ces vêtements sont produits.

Evidemment, les questionnements sur la rémunération des travailleurs et la qualité des conditions de travail s’avèrent pertinents…

La question du coût de fabrication

Produire un jean made in France à (par exemple) 50 €, implique des coûts de fabrication extrêmement bas. Même nous, on ne voit pas comment y parvenir ! Pour proposer des prix aussi compétitifs, les marques n’ont que deux recours :

  • réduire leur marge bénéficiaire
  • réduire les coûts de production

En d’autres mots, la qualité des produits ou les conditions de travail des ouvriers sont en danger. Il est difficile d’allier petits prix à la française et rentabilité… A vous de le déceler : s’agit-il de travailleurs mal rémunérés ou de fournisseurs contraints de réduire la qualité des matières premières utilisées ?

Pour vous donner un ordre d’idée, voici les prix minimums conseillés pour assurer qu’un vêtement made in France rémunère justement les travailleurs :

  • T-shirt : 35 €
  • Sweat : 90 €
  • Sweat à capuche : 110 €
  • Pull en laine : 120 €
  • Chemise : 90 €
  • Jogging : 90 €
  • Short : 80 €
  • Jean : 110 €
  • Casquette : 60 €
  • Banane : 60 €
  • Veste : 160 €
  • Blouson d’hiver : 250 €
  • Robe : 120 €
  • Jupe : 65 €

Nota : Le vêtement peut être durable mais à ce prix minimum, la matière n’est ni biologique ni recyclée.

Fast fashion = rythme de production effréné 

La pression appliquée sur les ateliers de confection

La production à grande échelle engendre souvent des tensions avec les ateliers de confection, même lorsqu’ils sont situés en France. La confection massive de t-shirts à faible coût entraîne (logiquement) des cadences de production élevées.

C’est la course, et les fabricants toussent.

La dimension sociétale rentre donc en jeu. Dans quelles conditions accepter de porter un vêtement confectionné vite fait sur le territoire français ? Quel modèle économique cautionner pour le “pas cher payé” ? Quelles convictions allez-vous porter ?

L’impact sur la qualité et les conditions de travail

La recherche de prix bas – et à tout prix – peut entraîner des compromis sur la qualité des produits et les conditions de travail des ouvriers. Des cadences de production élevées, un manque de valorisation du savoir-faire artisanal et une rémunération insuffisante peuvent affecter la qualité des vêtements.

Une production locale et éthique est-elle réellement possible à petit prix ?

Une étude de l’ADEME (« La Mode sans dessus dessous », 2022) souligne que la fast fashion repose sur un modèle de production à haute cadence, qui nuit à la valorisation des compétences et à la durabilité des produits.

Industrie textile : un impact environnemental loin d’être neutre

L’autre aspect de la fast fashion – qu’elle soit produite en France ou ailleurs – est son impact environnemental. La production à grande échelle génère une surproduction qui a des conséquences écologiques considérables :

  • chaque année, l’industrie textile représente 1,7 million de tonnes de CO2
  • le coton ne représente que 2,4 % des surfaces cultivées dans le monde, mais consomme à lui seul 24 % des pesticides mondiaux
  • chaque kilo de tissu fini a besoin de 100 à 150 litres d’eau pour être teint (Source : Courrier International)
  • l’industrie textile est responsable de 17 à 20 % de la pollution de l’eau à l’échelle mondiale (Source : Banque Mondiale)

French fast fashion : une fausse impression de durabilité

Vite confectionné, vite porté et (donc) vite jeté

Acheter un vêtement fabriqué en France ne signifie pas forcément adopter une consommation durable. En effet, si la qualité du produit n’est pas approuvée, le cycle de vie du vêtement en sera écourté.

Les t-shirts fabriqués en France ne sont pas toujours synonymes de pérennité. Ils peuvent rapidement se déformer sans parler de leurs couleurs délavées. On entretient donc un cycle de consommation rapide, propre à la fast fashion, qui nuit à la durabilité et aussi à la santé de son porte-monnaie.

Consommation rapide contre production raisonnée

La rapidité du renouvellement des collections et la stratégie de prix bas incitent à une consommation rapide, même si les produits sont fabriqués localement. On renouvelle rapidement sa garde-robe. Cette approche s’oppose à un modèle de consommation plus raisonné. L’idée proposée :  acheter moins, mais de meilleure facture, et fabriqué dans de bonnes conditions. La fast fashion française, bien que produite localement, repose sur les mêmes principes de surconsommation.

Quand le “made in France” dessert les marques réellement engagées

C’est que l’on appelle une concurrence déloyale pour les marques éthiques. Les enseignes françaises pratiquant la fast fashion portent préjudice à l’image des marques véritablement engagées dans une production éthique et responsable. Les coûts ne sont pas les mêmes et pourtant la guerre des prix sévit. Comment faire entendre qu’un t-shirt français à moins de 30 € n’est pas concevable ?

La prolifération de vêtements fast fashion fabriqués sur le territoire peut altérer l’image du « made in France ». Le consommateur risque alors d’associer le « made in France » à des produits bon marché et peu durables, compromettant ainsi les efforts des marques réellement engagées dans des pratiques éthiques.

Promesses marketing : ils sont doués, mais ne vous faites pas flouer…

Face aux slogans de production locale à prix cassés, il est essentiel d’adopter une approche critique et de s’interroger pour investiguer :

  • D’où proviennent les matières premières ?
  • Combien de collections sont produites par an ?
  • Est-ce que la marque dispose de labels de confiance ?
  • Quels sont les ateliers partenaires de la marque ?
  • Quelle est la rémunération des travailleurs ?

Pour favoriser une mode véritablement éthique, il est crucial de se tourner vers des marques transparentes sur leurs conditions de production et qui préconisent un modèle de consommation raisonné, axé sur la pérennité et (donc) la qualité. La véritable mode responsable ne repose pas sur des prix bas, mais sur des choix éclairés et des pratiques durables

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